Sel

Une émouvante saga familiale qui retrace une partie de l’histoire sous l’occupation allemande d'un point de vue original et mettant les femmes à l’honneur. Le récit est teinté des saveurs et couleurs de l’Italie même si le soleil n’y brille pas tous les jours, particulièrement durant cette période où seul un mot règne : la terreur. Le récit, à la fois romancé et historiquement très bien documenté, entraine les lecteurs dans le temps et dans l’espace, entre l’Italie fasciste des années 40 et la Belgique d’aujourd’hui. Originalité de la construction du récit qui en fait sa force : il repose sur deux héros unis par le sang mais qui ne se sont pourtant pas connus. D’un côté il y a Maurice, trentenaire blasé, enfant gâté, un « Tanguy » des temps modernes, couvé et entretenu par ses parents (« un adulescent » comme l’appelle sa mère surprotectrice) ; de l’autre, il y a Rosa, sa grand-mère disparue de manière peu claire avant sans naissance (on apprendra rapidement que Rosa était « juive déclarée non-juive », résistante et déportée dans les camps), adorée à travers son grand-père, véritable mythe et mystère familial. Entre les deux, « le Père », à la fois vénéré et haï.

Leur histoire est une histoire de famille comme des milliers d’autres, banale et extraordinaire, unique, riche et lourde à la fois, remplie de non-dits, de doutes, de tabous, de secrets, de petits bonheurs et grands drames. La guerre est passée par là, entrainant avec elle tout son lot d’horreurs.

Au fil des pages, on est happé dans une machine à remonter le temps, et on s’attache à chacun des personnages qui prennent justement leur place, jusqu’à l’épicier du coin qui jouera lui aussi un rôle fondamental dans l’histoire.  Chapitre après chapitre, on les apprivoise et on découvre les liens qui se sont tissés entre chacun d’eux. Subtilement, on se surprend alors à ressentir une empathie grandissante pour cet étrange Maurice, qui, a priori, nous semblait bien arrogant, pourri gâté et cynique, ne semblant avoir qu’un but dans sa vie : se venger de son père (on apprendra d'ailleurs que livre aurait pu s’appeler « La Vengeance du fils » ou « J’emmerde mon père »). Mais la vérité est bien plus complexe, comme toujours, empreinte de souffrance, de blessures, de non-dits et de déceptions dans le cœur d’un petit garçon. Et c’est cette vérité qui sera le fil rouge de tout ce très beau premier roman du blogueur/chroniqueur belge Marcel Sel. Une vérité à faire éclore au jour, quel qu’en soit le prix, la douleur, qu’elle convienne ou pas, parce que c’est elle qui sera libératrice.

 Olivia Moonen
Service de Communication

Marcel Sel, Rosa, Onlit Éditions, 2017, 272 p.

 

Lectures pour l'été 2018

 

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