Barbara Cassin : Le bonheur, sa dent douce à la mort
Une brève vidéo. Une classe d’élèves dont la langue maternelle n’est pas le français. Un exercice proposé par une philologue et philosophe récemment reçue sous la coupole et récemment titulaire de la médaille d’or du CNRS mais qui m’est néanmoins totalement inconnue. Cet exercice ? Rien moins pour les élèves que d’identifier dans leur langue « à eux » le mot qui manque le plus « au français ».
Brillant, inventif et accueillant s’il en est, l’exercice pousse le curieux à aller plus loin, à se plonger dans les travaux de cette magnétique Barbara Cassin. Comment dès lors se refuser le plaisir d’entamer cette découverte par sa dernière publication, au titre aussi énigmatique que séduisant : Le bonheur, sa dent, douce à la mort. Autobiographie philosophique ?
Constitué de trois parties, cette autobiographie philosophique entend interroger le rapport entre la vie et les idées, les concepts. Pourquoi la philosophe pense-t-elle comme ceci ou comme cela ? Comment des brins de vie l’ont-ils obligée à penser de telle ou telle manière ? À travers des « anecdotes follement signifiantes », Barbara Cassin déploie une réflexion sur son rapport à la vérité, à la religion, à l’autre, à la mort et pense la manière dont tout cela fait… concept.
« C’est un drôle de livre » dit son auteure. Effectivement, un drôle de livre. C’est surtout un livre magnifiquement bien écrit, drôle, émouvant et d’une intelligence rare. En réalité, derrière ce vers de Rimbaud, ce n’est pas un « livre » qui se cache mais un compagnon que l’on est ravi de retrouver, triste de quitter et vers lequel on revient et revient encore.
Thomas Beyer
Réjouisciences
Barbara Cassin, Le bonheur, sa dent douce à la mort. Autobiographie philosophique, Le livre de poche, 2022, 240 p.
