Louis-Ferdinand Céline : Guerre
Paradoxal à plus d’un titre…
Ce roman qui vient de sortir a été écrit il y a près d’un siècle ! (1934).
Il n’occupe que les deux tiers des 185 pages du livre, tant l’événement incite aux commentaires explicatifs, à l’indication du contexte historico-littéraire et à la documentation illustrative.
Les reproductions de feuillets du manuscrit original, un premier jet corrigé et annoté m’ont beaucoup intéressé.
L’histoire est simple : un soldat réchappé d’une mission tragiquement terminée finit par être recueilli et soigné dans un établissement particulier dont il s’échappe à toute occasion avec la complicité d’une infirmière fort spéciale.
Le style est étonnant ; on savait que Céline prenait des libertés avec le classicisme, mais ici on atteint des sommets ! De la syntaxe fantaisiste aux néologismes, des énumérations surréalistes aux descriptions très personnelles, du langage cru à l’argot pur (au point que l’éditeur vous gratifie d’un petit dictionnaire en fin d’ouvrage), je vous avoue – au risque de choquer certains — que j’ai eu souvent l’impression de retrouver le style et la fantaisie débridée du regretté Frédéric Dard.
J’ai lu la totalité de l’œuvre du second ; j’avoue n’avoir lu avant cet opus de Céline que le célébrisssime « Voyage au bout de la nuit » et un autre petit roman-essai... sans grand enthousiasme. Ce texte miraculeusement réapparu m’a, par contre, totalement séduit, me faisant oublier l’image poussiéreuse de l’auteur classique qu’on « doit » lire.
Pierre Graas
Écrivain, Alumni
Louis-Ferdinand Céline, Guerre, Gallimard, 2022, 192 p.
