Éric Vuillard : La guerre des pauvres


Vuillard

Thomas Muntzer n’a rien d'un étranger. Tout comme Wat Tyler, Jan Hus ou John Wycliff. C'est le cri d'Éric Vuillard qui nous emmène dans sa chevauchée effrénée des guerres de paysans. Ou plutôt, de la lutte pour l’existence. Ces noms de paysans, prédicateurs et autres réformistes ne disent aujourd'hui plus grand chose. Certains se souviennent peut-être vaguement de cette guerre de paysans allemands du XVIème siècle, du titre d'un ouvrage d’Engels ou d'une condamnation de Martin Luther. C'est la force de La Guerre des Pauvres de leur faire dire davantage que ce qu’ils sont censés représenter. Avec son écriture à la fois haletante et sensible, Vuillard donne vie à ceux qui, refusant l'injustice, ont fait le pari de l'égalité. Apparait l'inévitable mouvement de l'histoire, celui de la violence de ceux qui ne sont rien face à la violence déchaînée de ceux qui, contre vents et marées, s'accrochent obstinément et aveuglément à leurs privilèges. Thomas Muntzer, principale figure du récit, n'est décidément pas un étranger. Et le lecteur de comprendre l’empressement d'Éric Vuillard à publier son texte, en pleine crise des Gilets Jaunes. La guerre des pauvres ne s'était assurément pas terminée avec la mort du prédicateur anabaptiste, décapité un matin de mai 1525.

L'histoire de Muntzer, nous dit-on, serait celle de la violence, du fanatisme, du délire religieux. Il y a pourtant plus, ou peut-être, mieux à dire. Vuillard en fait un récit d'espoir. Que voulez-vous, « les exaspérés sont ainsi, ils jaillissent un beau jour de la tête des peuples comme les fantômes sortent des murs ». De ces peuples seulement viendra la victoire. Vuillard l'a promis : « je la raconterai ».

Elie Teicher
Histoire de la Belgique et de ses relations internationales

Éric Vuillard, La guerre des pauvres, Actes Sud, 2019, 68 p.

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