Rose-Marie François : Temps sans faux & Au soleil la nuit
Magie des mots dans tous leurs états. Autrice prolifique, Rose-Marie François est avant tout poète. Ce dernier recueil en date (le vingtième ?), sous un titre mutin, montre une nouvelle fois l’étonnante et sans doute apparente facilité avec laquelle elle trouve le mot juste, le rythme qui fait danser les sons. S’y côtoient émerveillements d’éternelle voyageuse, déchirements de nostalgie entre passé-présent, ponts lancés vers l’avenir de l’enfant qui « tout à coup » sait écrire, touches de commentaire social, réflexions sur la vie, l’écriture, la mort, mais le tout dans la légèreté de vers sautillants à l’instar de l’enfant se rendant à l’école, et ponctué de textes drôles sans amertume.
Son roman du Cap Nord, Au soleil la nuit, est fascinant dans ses dévoilements successifs, jusqu’à un fameux coup de théâtre. Il joue sur des identités brouillées : un enquêteur de compagnie d’assurances qui n’est pas celui qu’on croit, deux amies très proches dont les prénoms ne sont séparés que par la lettre du jeu (Marie-Jeanne et Marie-Anne), mais dont l’une est morte dans un accident d’auto, tout là-bas, tout là-haut, et l’autre reste, témoin désespéré, à corriger des rédactions en allemand sur le sentiment maternel dans la pièce de Brecht Le cercle de craie caucasien, thème qui n’est pas sans rapport avec les choix de son amie. Mais je n’en dis pas plus. Un roman, ça ne se raconte pas, a fortiori s’il se présente comme un policier.
Christine Pagnoulle
Langue anglaise : linguistique, littérature et traduction
