Arthur Schopenhauer : Aphorismes sur la sagesse dans la vie


Schopenhauer

Dans « Expérience et pauvreté », un texte important dont il est bien difficile d’épuiser le sens, Walter Benjamin définit la modernité en évoquant une fable qui ressemble fort au « laboureur et ses enfants », prétend qu’après le massacre de la grande guerre « le cours de l’expérience a chuté » et pose cette question non sans un certain agacement : « Où les mourants prononcent-ils encore des paroles impérissables qui se transmettent de génération en génération comme un anneau ancestral » ? La réponse pourrait bien être dans les écrits – romans et essais – de Michel Houellebecq qui se réfère obstinément et avec admiration à Schopenhauer, la figure spectrale de la philosophie allemande qui inspire profondément son travail d’écrivain. Bien sûr, le « senior » qui écrit les Aphorismes – Arthur a 63 ans quand il publie le livre – n’est pas le premier vieillard venu, mais peut-être ne sommes-nous plus tout à fait aussi modernes en 2020, après soixante ans de consumérisme forcené et une extension manifeste du domaine de la lutte. En pleine pandémie du covid-19 et dans ce confinement partagé par une large majorité des Terriens, un moment que Houellebecq a déjà désigné ailleurs comme « un instant d’incertitude métaphysique », j’ai choisi de lire ce petit traité d’Eudémonologie ou « art de rendre la vie aussi agréable et aussi heureuse que possible ».  Comme chez les stoïciens et les épicuriens, par « un anneau ancestral », on trouve bel et bien dans cette « philosophie par gros temps » des outils éprouvés pour réfléchir avec intelligence à « ce que l’on est », « ce que l’on a », « ce que l’on représente », et à adopter notre conduite en circonstance, « envers nous-même », « envers les autres » et « face à la marche du monde » … après cette mise en quarantaine de l’Humanité ! 

Stéphane Dawans
Philosophe - Faculté d'Architecture

Arthur Schopenhauer, Aphorismes sur la sagesse dans la vie, Trad. J.-A. Cantacuzène, revue et corrigée par Richard Roos,  PUF, coll. Quadrige, 2012, 225p.

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