Charlotte Bourlard : L'apparence du vivant


Bourlard

Une femme, sans âge précis, dont peu de traits physiques sont révélés : il faut gratter le terreau fertile de l’indifférence et de la brutalité pour déterrer les racines de son caractère. Tel le liseron, au fil des années, la narratrice s’est déployée par sa seule volonté, avec la ténacité d’une mauvaise herbe à l’apparente inoffensivité. Sa passion ? Photographier « des vieux nus aux yeux ouverts ». C’est d’ailleurs par l’entremise d’une annonce passée dans un journal local qu’elle les a rencontrés, eux.

Eux, un couple, les Martin. Des retraités pleins aux as. Une union d’amour, dépourvue d’enfants, remplie de musique classique et de leur métier : croque-morts. Suite à un accident, Monsieur ne quitte plus son immense lit. Il demeure néanmoins d’une extrême élégance et garde un œil perçant sur tout ce qui se passe chez lui. Madame, elle, « ressemble à une grand-mère innocente. Elle est vieille et coquette. Personne n’aurait envie de la soupçonner ».

Ensemble, ils forment un trio complice et cocasse.

Dans L’Apparence du vivant, premier roman publié chez Inculte, Charlotte Bourlard, munie d’une écharneuse linguistique, racle la chair du langage et en exploite les tendons. Son écriture, chirurgicale, tranche à vif et dissèque. Aucun mot superflu, aucune image creuse ; tout est méthodique, nerveux et cru. La langue directe et le rythme marqué concourent à insuffler une sensation de distance et de trouble à la narration. Tout en explorant un univers glauque, Bourlard fouille, avec une fermeté non dénuée d’humour et de finesse, le tréfonds des âmes et des corps. Étonnant et incisif !

Samia Hammami
Chroniqueuse littéraire. ISLV

Charlotte Bourlard, L'apparence du vivant, éditions Inculte, 2022, 132 p.

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