Hamsun

Le narrateur anonyme de La faim (1890) de Knut Hamsun, est un écrivain miséreux errant dans les rues d’Oslo à la recherche de nourriture et d’un logement décent. Ses écrits constituent une mise en abyme de certaines des préoccupations socio-politiques du roman. Ainsi, tandis que l’article intitulé « Crimes du futur » — qu’il espère vendre au rédacteur en chef d’un hebdomadaire de la capitale — désigne son propre délit de vagabondage, un autre essai, intitulé quant à lui « Le libre-arbitre », met en exergue l’orientation matérialiste et déterministe du roman, à l’instar d’un troisième article consacré à « La connaissance philosophique », pamphlet anti-idéaliste dont il espère qu’il lui donnera l’occasion de « mettre à mal quelques-uns des sophismes de Kant ». Seulement voilà, ses efforts sont battus en brèche par un monde qui sacrifie la pensée complexe aux sujets simples et aux titres accrocheurs. Plongé dans le désespoir et la déchéance la plus totale, le narrateur affamé de Hamsun abandonnera ses projets d’écriture pour embarquer sur un navire qui l’éloigne durablement, voire définitivement, de la capitale, laissant derrière lui ses ambitions artistiques et intellectuelles.

Michel Delville
Littérature anglaise et américaine

Knut Hamsun, La faim, trad. Régis Boyer, Le livre de Poche, 2004, 285 p.

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