Cormac McCarthy : La route


McCarthy

Un père et son fils sont sur la route. Autour d’eux, le monde n’est plus, ou plus grand-chose. Fable métaphysique ou roman post-apocalyptique, La Route est d’abord aussi un texte qui choisit de toucher là où ça fait le plus mal.

Que reste-t-il à faire quand tout est dévasté ? Comment garder encore espoir quand vos corps eux-mêmes se délitent ? Pourquoi vouloir encore avancer quand à chaque pas la mort guette ? Ces grandes questions, le roman de Cormac McCarthy les affronte de la manière la plus viscérale qui soit : en les réduisant à la simple expression d’un duo père-fils poussant comme ils peuvent un caddie sur une route vers le Sud, où ils ne savent en réalité pas trop quoi trouver. Pas de commentaires sur les causes du désastre où survivent les deux personnages (écologique ? industriel ? militaire ? – sans doute un peu de tout cela) ; pas de rebondissements palpitants au fil de leur périple, qui n’a rien d’une aventure ; pas de sophistication esthétique dans la langue du récit, qu’on dirait elle-même aussi dépouillée que les paysages que traversent les personnages. La Route se parcourt sans répit, d’un souffle – mais un souffle court –, tant la dureté de l’épreuve de la survie contamine l’expérience de lecture. Dans ces temps et ces lieux étirés par le vide d’un monde détruit, sans plus de repère ni de règle, l’humanité semble chercher, à tâtons, ce qui peut encore bien la définir – et, à demi-morte, elle touche du doigt l’horreur la plus absolue, comme l’émotion la plus pure.

François Provenzano
Sciences du langage - Rhétorique

Cormac McCarthy, La Route, Points, 2009, 252 p.

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